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Band of Brothers

Band of Brothers Part 15

Dans la rubrique Band of Brothers nous donnons la parole à des amateurs de sneakers, pour cette quinzième interview express, Thierry alias Aaman Aahtchoom Queen a des choses à vous dire…

Bonjour Thierry, présente toi en quelques mots ?
Bonjour, je me présente Thierry, 40 ans, développeur technique, passionné de sport et d’articles de sport dans son ensemble. Un attrait particulier pour la préparation sportive générale (nutrition, préparation physique, mental et équipement…). Ma plus grande passion reste quand même la chaussure de luxe, qui pour info n’a de luxe que le nom voire le prix, ces procédés de fabrication étaient un quasi-standard fin 19è jusqu’au milieu 20è siècle. Juste pour le parallèle, le savoir faire des bottiers il y a 100 ans facturaient quelques dizaines de francs, perdure aujourd’hui à quelques centaines d’euros certes mais maîtrisé par très peu. Alors que dans la sneaker, ce qu’on faisait de bien il a moins de 30 ans, on nous sert le même plat sans saveur à des prix souvent indécents…

Par quel biais es-tu venu à la sneaker (le sport, la curiosité du moment…) ?
Je suis devenu un consommateur par la pratique sportive comme beaucoup de personnes mais, mes parents étaient déjà très sportifs et consommateurs à leur époque. J’ai pratiqué l’athlétisme et la handball en intensif mais j’ai toujours pratiqué beaucoup d’autres sports et activités en parallèle pour me joindre aux amis ou assouvir une curiosité débordante.

Tu brandis une paire d’ Adidas Micropacer, qu’apprécies-tu dans ce modèle ? son histoire ou son côté lifestyle running ?
Je brandis cette paire comme j’aurais pu en présenter 10 autres. Mais à sa sortie en 1984, un shop en bas de chez moi l’exposait, je découvrais l’athlétisme à travers les J.O de L.A. Cette paire a été lancé pour les jeux, à cette époque Adidas était de loin le leader mondial. Je trouvais cette paire esthétiquement clean, un côté déjà décalé avant-gardiste (faut relativiser, l’offre du marché français était quand même quasi mono-marque en 1984). Techniquement, pour le coup, le gadget du podomètre (certes repris et amélioré par toute la concurrence et on voit ce que ça donne aujourd’hui) m’a fasciné 5mn à cause de la fiabilité. Par contre le semelle tri-densité est une vraie réussite repris sur d’autres séries, au contraire de la semelle de propreté  » serviette éponge  » et l’empeigne synthétique non respirant qui donne un confort juste extraordinaire mais, horrible pour courir. Je pense que c’est le produit image par excellence, une première qu’Adidas a fait sans le vouloir je pense.

Te souviens-tu de ta première paire?
J’ai hérité d’une Nike Sky Force et Adidas Surf de maman à 13 ans mais, je n’avais pas trop conscience de tout ça. J’étais content d’avoir vu mes pompes dans Les Goonies. Peu de personne se focalisait sur les marques en 1985. Un peu plus tard, un voisin m’a donné une paire de Air Jordan 2 parce qu’il la trouvait horrible, j’avoue m’être fait bien charrier à l’école avec ces kicks et, que Michael était moins connu que Dorothée pour moi. J’ai eu mon vrai coup de cœur pour la chaussure de sport en 1987/88, j’ai cumulé au grand regret de ma chère mère, Adidas Métro Attitude, Adidas Lendl comp, Air Max 1, Air Révolution et Nike Air Ace Low. La Nike Air Ace Low est coupable de mon pseudo-addiction, d’ailleurs, s’ils envisagent de la ressortir (facteur chance 1%), qu’ils m’appellent avant parce que ça me tuerait qu’ils la foirent. Je viens souvent à me poser la question suivante : est ce qu’ils ont déjà vu l’originale avant de lancer le rétro, les patrons, les moules et, le marketing ne suffisent pas pour justifier 150eu retail. Juste une anecdote que tous les fans ont vu ou vécu, voir son grand frère perdre la raison devant une paire de Le Coq Sportif Eclat grey/blk/yellow jusqu’à dormir avec ça n’a pas de prix…

Es-tu un collectionneur ou un passionné?
Je suis plus un passionné. Je ne me considère pas collectionneur mais plutôt conservateur. Je toujours cherché un produit qui répond à mon besoin sportif. Néanmoins j’ai des coups de cœur sur des rétros ou nouveautés mais jamais au point de d’acquérir toute ou partie d’une référence.

Tu évolues au quotidien dans l’univers produit, que penses-tu des dernières évolutions produit (technologiques) developpées par les marques de sport ? Est-ce nécessaire pour rester dans la performance ou le rétro peut-il être un marché qui se suffit à lui même ?
Les marques leader du marché ont toujours été actifs sur le développement technique des produits proposés. Ils ne cessent de créer de nouveaux concepts, déposent des brevets innovants et, ont un soucis omniprésent de répondre aux besoins du sportif. Cependant comme toute structure ils s’adaptent et répondent à un besoin du marché et, saisissent toutes opportunités de faire du débit qui est la finalité de toute entreprise. Les références du marché telles que Adidas, Nike, Puma, Asics…ne cesseront jamais de faire évoluer leurs lignes  » sport performance  » parce qu’ils ont une vraie passion et le patrimoine de ces marques a été construit autour du sport. Le marché du sportwear est suffisamment conséquent donc personne ne le néglige. Les marques ont du adapter leurs structures et, les collections pour satisfaire au mieux la demande. On a même constaté que des marques sont arrivés dans le sport performance par le biais du sportwear, on peut croire que le sportwear génère suffisamment de recette pour s’attaquer à d’autres marchés. J’ai la conviction par contre que sans le sportwear, beaucoup de marques seraient en grandes difficultés voire amenés à disparaître. Toutes les enseignes ont plus ou moins bien segmenté leurs offres en codifiant les différentes collections (logo, dénomination…). Elles appliquent des stratégies marketing totalement adaptés à chaque marché. Il y a 15 ans la tendance sneaker était vu comme un épiphénomène qui a très vite débordé les marques. Certains comme Nike ou Adidas ont su maîtrisé très vite la demande et adapter l’offre à coup de exclus, collab et de vintage, et d’autres comme Puma, Converse ou Reebok ont vite surfé sur la vague pour se refaire un image, revenir en haut de la page et renflouer les caisses.

Le marché du rétro peut se suffire à lui même tellement le patrimoine des marques est conséquent mais, ce que je trouve pertinent voire souvent dérangeant, c’est la volonté non assumée d’entretenir ce marché qui devient nocif pour l’image de marque de part la qualité souvent très contestable des produits compte tenu du prix et, que le grand public et certains sportifs qualifient ces marques de fashion ou swagg. Bien loin de leur cœur de métier, parmi les consommateurs, combien connaissent la sortie de  » Pink Foil  » ou  » Gamma Bleu  » de Nike ou encore Spingblade ou Boost de Adidas, bien moins que les consommateurs de Jordan Brand ou Adidas Original dont les sorties sont parfois organisées en grande pompe, campagne de communication intensive et event bling’bling…!

Le rétro est à l’honneur chez les marques depuis plus de 10 ans. Que penses-tu de la qualité de ces produits ? Les matériaux ayant évolué, est-ce que les rééditions sont forcément de meilleure qualité que les modèles OG ?
Les rétros ont commencé milieu 90’s mais la cadence s’est accélérée sensiblement depuis 5 ans. La mise en vente de certains produits (pas que des rétros) font l’objet d’une surveillance permanente au point de devenir l’event du mois comme la sortie de la aj XI Concord ou Yeezy 2, ça reste des cas exceptionnels certes mais les marques le savent et font tout pour nous tenir en éveil.

J’introduis en hors sujet volontairement pour y revenir plus tard.
Tout d’abord je tiens à informer ou rappeler qu’une sneaker n’est pas éternelle. Quelque soit le modèle, lors d’une utilisation sportive intensive, sa durée d’utilisation dans les conditions optimales ne dépasse que rarement 6 mois, au delà souvent elle perd sa propriété de maintien, adhérence, et son amorti…

Les OG, par exemple la série Air Jordan ou la série ZX d’Adidas étaient destinés aux sportifs amateurs ou pro mais, les rétros sont juste des copies qui ne servent qu’à paraître dans le vent ou assouvir une  » frustration  » de ne pas les avoir eu ou ne pas les avoir conserver. Rien de mal à cela. Ce qui devient pertinent, c’est la qualité des produits qu’on nous propose. Je veux bien admettre que les normes de fabrication ont changé (normes écolo etc…), que les matériaux d’époque sont difficiles à trouver, que les moules d’époque sont abimés… en 2013, ne pas être capable de reproduire fidèlement dans les proportions, les cw, des modèles fabriqués à plusieurs milliers de paires ne relève pas de l’incompétence mais, de la mauvaise volonté ou de la suffisance. Quant au prix de vente (qui ne se justifie pas par la qualité), comment justifier ces prix de ventes astronomiques ? Compte tenu que ces modèles ont déjà été amorti 100 fois, ces moules servent pour plusieurs modèles et au regard des multitudes de cw, ça décuple la production, je me demande ou est la plus value qui justifie ces prix.

La demande existe, le pouvoir d’achat existe, répondre à la demande par une production à dose homéopathique de piètre qualité en faisant passer l’acquéreur pour le chanceux de l’année est irrespectueux du consommateur. Et quand au delà de tout on lance des rétro’fuzion’collab ou variantes des OG pour augmenter les cadences des sorties, je dis qu’on prend le consommateur pour un inculte fini.

Ce que je trouve encore plus navrant, c’est que tout le monde s’en prend à Nike sur ce sujet. En effet Nike est certainement celui qui arrose le plus le marché de rétro ou néo-rétro mais, les autres marques font ou essaient de faire pareil avec la même bilan à mes yeux.

Le sneaker addict était censé être la version la plus méritante du consommateur lambda, mais aujourd’hui ce terme semble galvaudé ? Quelle importance accordes-tu à ce mot qui semble dans l’air du temps ?
Le sneaker addict dans sa définition est un consommateur excessif de sneaker. j’y distingue 2 catégories : celui qui achète des pièces très ciblées avec une histoire, un vrai intérêt pour le produit, la marque, qui va le bichonner dans le temps qu’on peut qualifier de collectionneur et, le consommateur qui veut être dans l’air du temps, sans personnalité, juste pour être hype et qui mettra des tiags quand ce sera la mode du tiag sans se soucier du reste,  » être dans le vent est une ambition de feuille morte  » comme disait Thibon Gustave. Le sneaker addict collectionneur est un vrai chineur passionné à qui les marques servent en ce moment des contrecopies, limite j’ai vu des fake bien mieux réussi que certaines rétro, c’est dire. Mais il restera toujours ce noyau de passionnés et, les marques en sont conscientes, ce noyau qui grossit de jour en jour et  commence à se spécialiser fonction des releases. Voilà les marques ont encore pris le pouvoir sur nous. Commençons à avoir des doléances si toutefois une oreilles nous écoutera ou un décisionnaire prendra le temps de nous lire. Je fais juste un écart au sujet pour envoyer un skud aux resseller, vous ne trouvez pas que les kicks sont déjà assez cheres comme ça pour encore taper sur les consommateurs et souvent des  » amis « , si vous voulez des affaires plus rentables et legit, appelez moi mais ça demande un petit peu plus que achat/revente…

Si je te dis que le running c’est la base…
Le running c’est la base, la base de la préparation, l’activité sportive la plus pratiquée, la base du sport. C’est par le running que plusieurs marques sont nés (Nike, Adidas, NB, Asics…) c’est généralement aussi par le running qu’ils commencent leurs travaux et déclinent le concepts sur les autres familles produits même si pour ma part cette manière de faire est de moins en moins adaptée au regard des connaissances qu’on dans les autres sports.

Le mot de la fin ?
Si la sneaker vous procure cette excitation du jouet de noël tant attendu, ne perdez pas cet âme d’enfant et cultiver l’adulescent que vous êtes, même si vous êtes un incompris, pourvu qu’on vous respecte.

Bien cordialement.

Thierry aka Aaman Aaahtchoom Queen from Makaahtchoom’Bay.

Crédit photos: Babylon

S.A

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