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De la sneaker au graphisme…

Bonjour Alexis, présente-toi en quelques mots
Bonjour à tous et merci pour la tribune que vous m’accordez. Je suis Alexis Billy aka MiZAl Touch Concept, j’ai 34 ans, je suis graphiste de profession, j’habite et travaille à Paris depuis 5 ans. J’officie aussi bien dans la photo, l’illustration, la peinture et depuis presque 10 ans j’opère en tant que graphiste photo-monteur.

Pour ceux qui ne connaissent pas ton travail, peut-on dire que tu es passionné de sneakers et que le graphisme et cette passion sont interconnectés dans ton travail? Explique comment en es-tu arrivé là?
Je suis venu au graphisme pour assouvir un besoin de création permanent. J’ai eu la chance de pouvoir en faire mon métier. Ma passion pour la Sneaker a littéralement explosé en 1992 grâce aux JO de Barcelone et la légendaire Dream Team. Charles, David, Scottie, Patrick et surtout l’irremplaçable Sir Michael Jordan. C’est à partir de 2004 que ma passion pour la Sneaker a réellement pris toute sa mesure lorsque je suis rentrée dans la vie active. Mes premiers salaires m’ont payé mes premières paires. Aujourd’hui la basket est une source de création, comme d’autres artistes tels que Dave White, Davo Howarth, Naturel ou bien Karim le H. C’est une question de génération je pense.

Tu réalises un travail de photo-montage numérique avec un rendu graphique assez saisissant. Cela peut-il expliquer le côté déconstruit de certaines de tes œuvres? Comment définirais-tu ton travail ou puises-tu ton inspiration?
Mon travail de photo-montage résulte d’une envie de concevoir des visuels vivants, imparfaits comme une vieille mécanique où le superficiel n’a pas de place. Le travail de la photo comme matière première permet d’obtenir ce rendu graphique. Mon autre passion pour les robots est une grande source d’imagination. Pour la série MEKA BOT et MASK ID, j’ai puisé mon inspiration dans la Pop culture avec des films comme Pacific Rim ou Real Steel, des films d’animation comme Gundam, Goldorak, Wall-e. Tout ce qui a un rapport au monde des robots enrichit mon univers graphique. Pour mes dernières créations sur le thème des Air Jordan c’est pareil. Même si la technique est différente, je cherche à créer des visuels texturés, dynamiques, j’évolue dans une recherche de dématérialisation visuelle esthétique.

Chacune de tes œuvres semblent raconter une histoire avec une multitude de détails. Réfléchis-tu à l’avance à une mise en situation de tes visuels?Chaque création est l’aboutissement d’une réflexion dans laquelle plusieurs contraintes comme le thème, les couleurs, le support sont pris en compte dans ma démarche artistique. Lorsqu’il s’agit d’une commande, certaines contraintes peuvent être soumises par l’acquéreur. Pour le tableau de la Air Jordan 7, le thème et les couleurs m’étaient imposés. Il n’y a pas beaucoup de place pour l’improvisation. J’ai remarqué que la plupart des œuvres en rapport avec l’univers de la basket, la représentent de profil. Le design de la Air Jordan 7 est tellement parfait que chaque point de vue est riche en graphisme. J’ai donc trouvé une disposition qui permet de voir trois facettes de la basket. L’histoire, avec la multitude de détails, c’est surtout dans ma tête que ça se passe. Je réfléchis beaucoup avant la conception, pendant la réalisation et des fois bien longtemps après. Parfois même certaines de mes créations restent inachevées tant que je n’ai pas trouvé le dénouement de l’histoire que je me raconte.

De nos jours, on utilise beaucoup l’ordinateur et des logiciels comme Photoshop de manière abusive. Ne trouves-tu pas que cela a pour effet d’entrainer une certaine distorsion du réel? Ne sommes-nous pas devenus des consommateurs passifs du réel?
Ca ressemble bien à un sujet de Philo ça!!! Le réel est-il une preuve d’authenticité? La perfection est-elle une fiction? “Et si on essayait avec deux trois bidouilles et un flou gaussien de s’approcher de la perfection, on vendra du rêve.” Alors je ne sais pas si nous ne sommes pas devenus des consommateurs passifs du réel mais beaucoup d’entre nous dorment profondément. Je ne jette pas la pierre, moi perso j’ai besoin de mes 8 heures de sommeil par jour… Plus sérieusement la retouche abusive d’images destinées à informer, vendre ou divertir envahit les médias. Effectivement je pense que cela a pour effet de créer un écart de perception entre la réalité et la fiction. La quête de la perfection et de l’extraordinaire conduit à rendre le consommateur esclave d’une vision biaisée de la société de consommation. Il ne tient qu’à nous de savoir faire la part des choses et de travailler son sens critique. C’est un exercice de tous les jours pour éviter d’être un consommateur passif du réel. J’ai bon?

Es-tu fan de sneakers? Par quel biais es-tu venu à la Sneaker (le sport, la curiosité du moment) Fan de sneakers?
Affirmatif depuis plus de 20 ans. Sauf qu’à l’époque il était inconcevable pour mes parents de mettre 1000 Francs dans une paire de chaussures destinée à faire du sport. Ce qui a certainement eu pour conséquence de créer un sentiment de frustration, de ne pas pouvoir posséder des merveilles qu’étaient les Air Jordan, Reebok Pump, LA Gear, BK, Ewing… À l’époque pour assouvir ce besoin d’acquisition, je découpais les images de baskets dans les catalogues style La Redoute. Je les collais dans un cahier destiné à recenser les différents modèles. Je me contentais de ça… Il y avait aussi le fait que j’étais le plus petit d’entre mes potes, alors je récupérais leurs baskets qui étaient devenues trop petites pour eux. Je prolongeais leur espérance de vie. Comme je l’ai dit plus haut, mon entrée dans la vie active m’a permis d’acheter des modèles mythique comme par exemple la Nike Air Raid Urban Jungle ou la Reebok Omni Lite Dee Brown. Aujourd’hui je dois avoir une soixantaine de paires pour lesquels je voue une sincère admiration de conception et d’esthétisme.

Te souviens-tu de ta première paire?
Ma première paire était une Nike Air Trainer Huarache achetée en solde à Décathlon. Mais je pouvais la porter uniquement pour jouer au Basket-ball le mardi soir dans l’unique club de ma ville. Mais bon ; Je m’arrangeais toujours pour pouvoir la mettre les jours d’EPS au collège. C’était une éternelle négociation avec mes parents pour pouvoir la porter le plus possible.

Qu’est-ce qu’une Sneaker pour toi? Un objet utilitaire, du design populaire ou un accessoire de mode…
Pour moi la sneaker est bien plus qu’un accessoire vestimentaire, c’est un marqueur historique et esthétique, témoin d’une période, d’une époque qu’on se doit de faire vivre. Je suis partisan du Rock Don’t Stock parce que je souhaite profiter de cette passion et la faire partager au plus grand nombre. Entre connaisseurs, on se remémore son histoire par exemple la sortie récente de la Nike Air Command Force, nous a rappelé à tous le film “Les Blancs ne savent sauter”, le modèle était porté par Woody Harrelson alias Billy Hoyle en 1992. Pour les novices c’est un moyen de faire connaître et d’enrichir leur culture sneakers.

Pourquoi existe t-il un tel engouement pour la basket de nos jours?
L’engouement pour la basket de nos jours est dû aux besoins d’identification et d’appartenance des nouvelles générations par rapport à leurs ainés et leur entourage. Je ne pense pas que la génération 80 et les générations X ou Y ont la même approche de la sneaker. Autant les trentenaires ont un rapport nostalgique à une période donnée, autant les plus jeunes sont plus dans une démarche d’acquisition de modèles tendances, de posséder une paire limitée, sans prendre en compte le côté historique de la chose. Personnellement je pense que la quête de la tendance et le besoin de posséder ce que l’autre n’a pas, nuit à certaines marques comme les Air Jordan. Et je ne parle pas du resell ni de la stratégie de rareté de certaines marques. Tout comme Lacoste dans les années 90. Trop de Jordan tue la Jordan. Dommage.

Le mot pour la fin…
Rien à voir mais je voulais faire partager l’action de l’ONG Sea Shepherd, vouée à la protection des créatures marines depuis 1977. Elle engage de nombreuses actions pour dénoncer la destruction de la faune marine et la surpêche et sensibiliser le public. Plus particulièrement, Sea Shepherd agit contre la chasse à la baleine, aux phoques, contre la pêche aux requins et contre l’usage des filets dérivants. Si ce sujet vous intéresse voici un lien vers leur site français : http://www.seashepherd.fr. Merci Sneakers Culture et rendez-vous sur mes pages Facebook pour découvrir les différentes facettes de mon travail.

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S.A

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Fred Ebami de la sneakers au graphic art…

Bonjour, Fred présente en quelques mots ?
Bonjour je m’appelle Fred Ebami né en France d’origine Camerounaise, j’ai grandi dans le 92 à Villeneuve la Garenne. A un moment de ma vie j’ai véçu au Cameroun puis j’ai poursuivi mes études supérieures

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Samuel Nadeau, au nom de ma mere…

Bonjour Samuel, présente-toi en quelques mots ?
Bonjour, je suis Samuel Nadeau 31ans, Sarcellois de coeur, éducateur sportif à l’heure actuelle, et ancien basketteur pro, mais basketteur dans l’âme aujourd’hui, hier, demain et pour toujours…

En tant qu’ancien basketteur pro passé par des clubs aussi prestigieux que le Real de Madrid ou encore Limoges, explique-nous à quel moment tu as pris conscience de ton potentiel, as-tu eu un déclic ?
J’ai eu ce fameux déclic en 1996 en constatant que de Sarcelles j’avais atteint les pré sélection de l’équipe de France, cela m’a donné confiance en moi.Un an avant j’ai croisé le basketteur Thierry Zig qui m’a beaucoup conseillé, et j’ai su alors en intégrant le centre de formation de Levallois en cadet que j’avais fait une bonne partie du chemin.

Ta carrière a été jalonnée de succès et d’échecs qui ont forgé ton mental de sportif et en tant qu’individu, pourrais-tu nous en parler ?
Ma carrière, comme j’aime le dire aux gens a plutôt été une carrière d’étoile filante, je n’appelle même pas ça une carrière à proprement dit mais un passage éclair dans le milieu du basket professionnel, et pas forcement pour les bonnes raisons. Le basket était un objectif que je mettais mis en tête pour aider ma mère qui se retrouvait dans une situation financière difficile. Cependant mon amour de ce sport depuis tout petit m’a permis d’entretenir l’espoir d’une carrière pro. Mon objectif était d’arriver le plus loin possible et de jouer dans la meilleure ligue du monde qu’était la NBA, je n’ai jamais rêvé de Pro A ou d’autres ligues mineures… Je voulais arriver le plus loin possible pour sortir ma mère de la galère grâce à ma passion.

En 2000, tu es en high school aux Etats-Unis et tu tournes à 28 points de moyenne… Tu es alors courtisé par toutes les meilleures universités américaines, mais tu décides contre toute attente de tourner le dos au basket pour revenir en France t’occuper de ta mère malade, avec le recul, prendrais-tu aujourd’hui la même décision ?
Beaucoup de personnes m’ont déjà posé cette question, que je trouve assez marrante… Pour ma mère je ferais n’importe quoi, hier, aujourd’hui ou demain. Ma mère c’est tout pour moi, alors à cette question, je répond oui avec un large sourire…

Il est vrai que mon passage aux Etats-Unis m’a révélé, c’était les plus belles années sportivement parlant, je laissais mon jeu parler pour moi, je me suis senti accepté et compris. Pas comme en France. Il faut dire aussi que les portes de la NBA avait de grand chance de s’ouvrir devant moi, les grandes universités étaient prêtes à m’accueillir, elles m’écrivaient tous les jours. Mais le fait que j’apprenne que ma mère, la personne qui m’est la plus chère au monde, en plus de ses galères financières soit atteinte d’une maladie incurable, a tout fait basculer pour moi. Tout ce qui m’intéressait c’était l’instant présent, de passer du temps avec elle et de l’aider à sortir de la galère et à réaliser ses rêves avant que sa dernière heure ne survienne. Aujourd’hui encore je prendrais la même décision sans hésiter, même si je sais qu’on pouvait me garantir la NBA pendant un an. Mais pour moi, la santé de ma mère passe avant tout autre chose….

Ton retour en Europe dans le monde du basket Pro ne se fait pas sans heurts, on a l’impression que tu n’arrivais pas à t’adapter ou à te faire accepter à ta juste valeur ? Pourrais-tu donner ton sentiment sur cette période de ta vie ?
Dans le milieu pro, j’ai appris des vérités fondamentales, entre autres que c’est un monde « professionnel » ; moi j’étais un fan de basket, pour moi le plus méritant devait être sur le terrain. Mais ce n’est pas si simple… Pour exemple, mon arrivée en 2000 au Real Madrid basket fut confuse : je suis signé mais je ne fais pas partie des plans du coach et je suis privé de temps de jeu tout simplement. Alors au bout de la troisième année, j’ai décidé de rompre mon contrat de 5 ans car j’étais frustré de ne pas pouvoir m’exprimer sur le terrain. J’étais un peu dégoûté du jeu car j’avais le niveau mais on ne me donnait pas ma chance. Il faut dire que la situation du club était compliqué et que j’étais jeune aussi. J’ai signé alors à Limoges mais l’expérience fut brève, ce qui devait être un challenge s’est vite transformé pour moi en un retour en arrière. De toutes façons, j’avais atteint mes objectif qui étaient de soulager ma mère financièrement, de la rendre heureuse, et ne rien devoir à personne.

C’est à ce moment que le club de Vichy est venu me chercher en me disant que j’avais encore le niveau. Ca je le savais mais ma quête était d’être heureux en jouant car je n’avais jamais rêvé de jouer en pro A… Malgré mes performances de pré saison, je ne jouais toujours pas en début de la saison régulière. Le premier match que j’ai joué en tant que titulaire, j’ai marqué 14 points et réalisé ce que mon entraineur attendait de moi avec une victoire, la je me suis dis ok, je rêve pas, j’ai le niveau et on est dans la réalité, le coach m’a fait joué, j’ai fait mon job et on gagne. Mais encore une fois je n’ai pas eu le retour escompté de la part de mon entraîneur. Il a fait ses choix que je fus en quelque sorte forcé de respecter. Au bout de la deuxième saison, même en me donnant à fond je ne faisais toujours pas partie des plans du nouveau coach, alors je me suis dit que j’aimais le basket mais avant tout que j’avais le respect de moi-même et que je pouvais plus encaisser des mensonges ou des réponses évasives quand à mon apport pour l’équipe. Je ne prenais plus de plaisir, alors j’ai préféré quitter ce milieu. De toutes façons, comme je l’ai déjà dit, la pro A ne m’avait jamais fait rêver, c’était donc comme une confirmation, un signe… Alors j’ai pris la décision de rentrer chez moi et de mettre le basket entre parenthèses…

Cites nous les deux meilleurs moments de ta carrière sportive ?
Le 10 Janvier 2000 à Philadelphie, ce soir-là je n’aurais pas dû jouer car j’étais grippé. Mais une fois sur le terrain, je me mets à tirer de tous les cotés du terrain et à ma grande surprise, tous mes shoots rentrent… je me sens bien, je vis un momentum, tout le monde me regarde et mon co-équipier de l’époque, Yohann Sangaré, vient me voir en me disant « Samuel continue, tu vas battre le record de points de l’école, c’est incroyable ce que tu fais ». Il m’annonce que j’ai déjà marqué 55 points et là je prends conscience de mon énorme performance, j’efface l’ancien record des tablettes de l’école en scorant 61 points en 32 minutes ce qui n’est pas rien… Mais je pense que ce jour-là je pouvais même en marquer bien plus que ça…

L’autre souvenir c’est un match en 2007 que je jouais avec Sarcelles qui était alors en N3, et on jouait la montée en N2 contre l’équipe de Rueil qu’on avait battu de 25 points chez eux. Mais ils étaient capables de nous battre de 25 points aussi chez nous. C’était vraiment un match spécial car je voulait offrir à Sarcelles la montée en N2 tant désirée et méritée depuis plusieurs années, cela me tenait vraiment à coeur. Je me mets alors en mode mission et je suis dans un état de grâce, je marque une quarantaine de points, on perd le match mais grâce à notre bon goal average on accède quand même à la N2. Ce n’était pas la première ni la dernière fois que je marquais autant de points, mais au-delà de mon apport au scoring, c’est un effort collectif d’équipe qui nous a permis d’y croire jusqu’au bout. J’ai adoré ce moment.

Au cour de ta carrière, certains sportifs comme Claude Makélélé, Zidane ou encore Babacar Sy ont à un moment croisé ta route en t’aiguillant ou en t’offrant leur amitié dans les moments difficiles, pourrais-tu nous en dire plus ?
Babacar Sy est celui que j’ai rencontré en premier, même si il n’a pas été le premier à m’aiguiller, Thierry Zig a eu ce rôle tout d’abord et ensuite Babacar est entré dans ma vie. Pour moi il fut comme un ange envoyé des cieux, parce que il n’attendait rien en retour, il faisait tout, juste avec le cœur, il a toujours été là pour moi, pour m’aider et me conseiller, je lui dois beaucoup dans mon parcours professionnel. En ce qui concerne Claude Makélélé, c’est mon cousin, le frère de Nicolas Anelka, qui me le présente à son arrivée au Real Madrid et depuis on ne s’est jamais lâchés, il m’a toujours soutenu car lui aussi a vécu une carrière avec des hauts et des bas, c’est un homme d’expérience et de cœur que j’ai souvent écouté. Je le considère comme mon frère, encore aujourd’hui nous avons gardé une relation de très grande complicité. En ce qui concerne Zidane, je l’ai toujours considéré comme un parrain à l’époque du Real Madrid, et aujourd’hui encore il est de bon conseil. Par ailleurs, son père a été l’un des premiers hommes à me toucher sincèrement quand je vivais un grand moment de frustration avec le Real. Je lui suis encore redevable d’avoir su trouver les bons mots pour m’expliquer subtilement mais avec force que mon parcours était en soi une réussite, que de là où je venais, et là où j’étais arrivé, j’avais presque tout réalisé, et qu’il me suffisait juste d’être patient… Ces mots avaient pour moi une vraie valeur, à demi mots, je sentais parler toute l’histoire d’un homme, son expérience et son vécu. J’ai compris en cotoyant Zidane comment son père était partie prenante dans sa réussite.

Depuis 6 ans tu es éducateur sportif à Sarcelles, là où tu as grandi. Est-ce important pour toi d’être revenu là où tout a commencé, et d’aider les jeunes au travers de ton expérience personnelle ?
Sportivement parlant tout a commencé à Montreuil, mais ma vie avec ma mère et ma sœur a bel et bien débuté à Sarcelles. Cette ville m’a tout donné, j’ai grandi ici, je m’y suis formé même si je l’ai quitté jeune. Elle m’a tout offert en terme d’opportunité. C’était normal d’y revenir et de rendre aux enfants ce que cette même ville m’a offert étant jeune, et de leur faire ouvrir les yeux sur la situation dans laquelle ils sont, et de leur faire découvrir leur potentiel. Etre éducateur sportif c’est pas un métier facile mais très riche d’enseignement. De plus ma vie et ma carrière sont comme un message. Des valeurs fortes, humaines, ont guidé mes choix et ma vie au quotidien. C’est important de le faire comprendre aux enfants, c’est la chose que je souhaite partager avec eux pour qu’ils aillent de l’avant. C’est un devoir que de le faire…

Certains observateurs pensent encore aujourd’hui que tu avais tout pour aller en NBA, si et seulement si… Nourris-tu des regrets ?
Des regrets, j’en ai jamais… Je l’ai appris de ma mère qui m’a toujours dit de faire les choses à fond pour n’avoir aucun regret plus tard, et aujourd’hui je n’en ai aucun.

Est-ce que j’avais le niveau NBA ?.. Bien sur que je l’avais, quand j’étais aux Etats-Unis, parmi des millions de joueurs, je faisais partie du top 100, et à mon poste j’étais classé dans le top 10 avec des joueurs comme Dejaun Wagner, Eddy Curry, Darius Miles, Zach Randolph, Kwame Brown, Gerald Wallace, Deshaun Stevenson… Reporté à l’échelle du basket français c’était juste phénoménal ! Dans un pays où on ne donne rien, qui est la référence du basket mondial, j’ai fait partie à un moment des meilleures joueurs. Je n’ai effectivement pas joué en NBA mais je sais très bien que j’avais bien le niveau. En effet, j’ai fait un choix qui m’a écarté de ce chemin par amour pour ma mère, mais nourrir des regrets serait tout de même idiot…

Dans toutes les situations que tu as connues, tu es toujours allé de l’avant, quel conseil pourrais-tu donner à un sportif pro ?
Le milieu professionnel n’est pas facile pour tout le monde, il y a ceux qui jouent et qui le méritent, et ceux qui jouent pas et qui le mériteraient. C’est un choix de coach et d’entraîneurs que l’on doit accepter. Jouer en pro c’est un métier et dans la vie, il arrive parfois que l’on ne soit pas toujours heureux dans son métier. Donc si vous le prenez comme un métier, travaillez dur et tenez du mieux que vous pouvez, si vous le prenez comme une passion il aura toujours un niveau où vous pourrez jouer, vous exprimer sans être brimé. Mon conseil, n’abandonnez jamais vos rêves, ne laissez pas les gens rentrer dans vos têtes. Je pense que le travail paie toujours, mais il y a toujours des complications, faire les bons choix n’est pas si simple.

Tu possèdes une collection de paires signées par les meilleurs joueurs de la planète. Quelle paire a le plus de valeur pour toi ?
En fait, il y en a plusieurs, notamment celle de Mickael Pietrus qui est comme un frère pour moi, celle de Claude Makélélé, de Thierry Zig, Nicolas Anelka, Zinedine Zidane ce sont des gens dont je peux vraiment parler que je connais personnellement, dont je suis proche. C’est donc pour ça que j’accorde plus de respect et de valeur à ceux dont je connais la véritable histoire. Cependant d’autres paires signées trouvent grâce à mes yeux comme celles de Ronaldo, Roberto Carlos, Kobe Bryant, Dwight Howard, Chris bosh , Allen Iverson, Derek Anderson, Kevin Garnett. C’est une fierté d’avoir ces paires de professionnels dont j’admire la carrière. Je suis un collectionneur qui possède environ 180 paires que je porte pour marcher ou pour jouer et une trentaine de paires collectors que je ne porte pas..

Mais une paire manque à ma collection… c’est celle de Joakim Noah qui est pour moi le futur flambeau du basket français même si on le dit pas… Il fait les choses avec cœur et il se bat ! C’est incroyable de voir ce qu’il est capable d’accomplir sur un terrain de basket.

Le mot de la fin ?
La vie n’est pas facile mais il faut savoir l’accepter, tout est possible, mais il faut le vouloir. Grâce à ma mère j’ ai réalisé ce que je voulais et je pense que chacun d’entre nous on a cette possibilité de réaliser ses rêves, mais il faut savoir ce qu’est vraiment la réussite… Il arrive que l’on ait réussi mais on ne le constate pas toujours, on voudrait alors ce que l’autre possède, alors que la réussite nous l’avons déjà dans nos mains depuis un certains temps. Il faut savoir ouvrir ses yeux et son cœur pour accepter sa propre réussiste…

S.A

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La Jordan V Tiffany by Raphy

Qui a eu un jour la curiosité de customiser une paire pour son plaisir, Raphy simple amateur de Sneakers en a eu l’idée, nous lui avons posé quelques questions afin de connaître sa démarche.

Présente toi en quelques mots ?
Bonjour Max et bonjour tout le monde, je m’appelle Raphael (Raphy Ghezouani sur Facebook et @raph_is_a_joke sur insta), j’ai 24ans, j’habite Lille, je travaille dans un milieu qui n’a rien à voir la basket puisque je suis manutentionnaire. Sinon, je pratique le football en club depuis tout petit, je commence tout doucement à me lancer dans la photo et je suis passionné de sneakers.

On a récemment aperçu ton custom assez particulier d’une Jordan V Tiffany ? Peux-tu nous en dire plus ?
Que dire sur ce custom si ce n’est que c’est ma première vraie création. Je m’étais déjà amusé à “customiser” des Swoosh sur mes Nike AirMax mais ce projet c’est autre chose. J’ai vu pas mal de customs plus ou moins bien fait fleurir sur le net ces derniers temps comme la magnifique AF1 pigeon de mon pote Mehdi (dont même Jeff staple a parlé) ou la Asics GL3 COA de Rudness et je me suis dit pourquoi pas moi. C’était plus un défi personnel, je voulais savoir si j’étais capable de faire un truc de qualité. J’ai donc décidé de me lancer en choisissant une base connue (Air Jordan 5 Oreo) et un coloris simple mais apprécié dans le milieu, celui de la Nike Dunk x Diamond Supply Co (Tiffany). Je dois avouer que je me suis vraiment amusé et que le résultat est plutôt cool.

Eclaire-nous sur les différentes étapes qui jalonnent la création de ce modèle si particulier ?
J’ai suivi 5 grandes étapes pour élaborer ce custom:

– Le choix du CW: le coloris Tiffany. Un coloris simple, beau, efficace et reconnaissable entre 1000 avec son contraste entre son noir profond et son turquoise lumineux.

– Le choix de la base: La Jordan V Oreo. Même si ce n’est pas mon modèle préféré je trouve que son upper en nubuck noir colle parfaitement au thème que j’ai choisi.

– Le Check: J’ai fait un tour sur le net pour savoir si l’idée n’avait pas déjà été prise et même si certain modèle existe déjà, aucun ne collait vraiment à ce que je souhaitais faire a savoir ce rapprocher au plus du modèle de base (la Dunk tiffany).

– La vectorisation: C’est une sorte de croquis de la paire que l’on fait sur l’ordinateur et qui m’a permis de tester différentes associations jusqu’à trouver la bonne.

– L’application: C’est le travail à proprement parlé, l’étape qu’il ne faut pas louper et où on doit s’armer de pinceaux, peintures et surtout de patience et de précision pour un résultat le plus propre possible.

Selon toi, pourquoi le custom est-il si répandu ? au point que certaines marques récupèrent cette tendance issue de la rue ?
Pour moi il devient de plus en plus populaire car il permet à n’importe qui de laisser libre court à son imagination et de créer des paires uniques qui pourront, qui sait, inspirer les marques. C’est en quelque sorte un moyen de se démarquer. Et pour ceux qui veulent un custom mais qui ne se sentent pas l’âme d’un artiste il y a toujours les pro du domaine comme Rudnes Custom, Rudboy ou Julien Swoosh en France mais aussi JBF et Noldo aux US. Cette tendance s’exporte tellement que les marques ont senti le filon et proposent des programmes de personnalisation de plus en plus poussés. C’est un moyen comme un autre de capter le client surtout quand on voit la multitude de modèles, matières et coloris proposés sur le Nike ID par exemple.

L’avènement des programmes ID chez les marques depuis plusieurs années est-il une simple réponse à la personnalisation produit ? Ou est-ce un moyen d’attirer les fans de custom vers ces dites marques?
Les programme de personnalisation sont en pleine expansion c’est vrai. Les marques ont bien compris qu’en matière de chaussures comme en matière de lunettes ou de voitures, le client aime avoir ce qu’il ne trouvera pas chez le voisin. De plus ce système n’est pas exclusivement réservé à la chaussure Lifestyle mais aussi aux B-ball, aux chaussures de foot et d’athlétisme par exemple, tout pour ce prendre pour une star sur le terrain. Et en proposant toujours plus de nouveautés (matières, coloris, bases…) les marques cherchent à attirer de nouveau clients sur un nouveau marché même s’il faut bien avouer que le quasi monopole est détenu par Nike . Si le prix d’une paire est un peu plus cher qu’un modèle basique, cela permet d’avoir sa propre création avec de bon matériaux. Puis pour ceux qui veulent l’excellence il y a aussi le programme BESPOKE qui est encore plus poussé mais qui n’est pas à la portée de toutes les bourses. Donc pour résumer, c’est un bon moyen de se différencier à moindre coût et d’attirer toujours plus de clients même si un vrai fan de custom trouvera ce type de programme assez limité et se sentira sûrement un peu trop enfermé à mon goût.

Le mot de la fin ?
Merci Max de m’avoir permis de présenter ce custom et de m’avoir donné la chance de m’exprimer ici. Je tiens à remercier tout particulièrement trois amis que j’ai rencontré grâce aux kicks et qui m’ont aidé et conseillé tout au long du projet: Mehdi AKA Disiz, Jeremy Leger dit le barbu et Joey JoJo l’hollandais. Ces gars là prouvent que le game n’est pas mort comme certain le laissent entendre. Un petit big Up aussi à ma #TeamBourbier .

S.A

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Ma Dunk Wu Tang par Tex Lacroix

La basket sait rassembler et désunir aussi, elle sait parler aux passionnés et peu les séparer sur la légitimité ou non d’un produit, d’une vérité ou sur la façon de se l’approprier. Mais la basket est  aussi vecteur d’innombrables histoires, d’anecdotes

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Mike Pietrus, de Pau-Orthez à Jordan Brand

Bonjour Mike, présente toi en quelques mots ?
Bonjour, je suis Mike Piétrus, je suis basketteur pro originaire de la Guadeloupe. J’ai 32ans et je mesure 1m98. Je suis en NBA depuis 10ans, j’ai été drafté en 2003 en 11ième position, je suis le premier joueur français à avoir été sponsorisé par Jordan Brand.

Tu es un basketteur Pro passé par l’équipe de France et des clubs prestigieux comme Pau Orthez, Golden State Warriors, Orlando Magics, Boston Celtics. Avec le recul explique-nous à quel moment tu as pris conscience de ton potentiel ? As-tu eu un déclic ?
Très bonne question, j’ai pris conscience de mon potentiel il y a exactement 10 ans quand je jouais encore pour l’équipe de Pau Orthez, je prenais plaisir à jouer au basket sans me préoccuper de mon avenir en NBA. Et puis un jour Jerry West, aka le logo de la NBA s’est déplacé pour venir me voir jouer à Pau, c’est la que j’ai pris conscience que j’avais peut être du talent. Ca a été le tournant de ma jeune carrière, alors j’ai redoublé d’effort car je ne voulais pas gâcher mon talent et il fallait que j’en fasse quelque chose. C’est une anecdote que très peu de gens connaissent …

Après avoir évolué à Pau Orthez basket, tu as rejoins la ligue américaine. Es-ce le parcours dont tu avais rêvé quand tu étais plus jeune ?
Pas vraiment en fait, lorsque j’étais jeune, je regardais avec beaucoup d’attention Michael Jordan et les finales NBA et je me prenais à rêver de pourvoir moi-même un jour faire partie de cette ligue sans espoir véritable. Et à force de travail et d’abnégation ce jour est arrivé, je m’en rappelle très bien, c’était le 26 juin 2003, jour où je fut drafté par les Golden State Warriors, il y a déjà 11 ans. A l’époque, je ne savais pas où se trouvait la ville de San Francisco où était implantée la franchise, pire je n’avais même jamais entendu parlé des Warriors ! Mon seul et unique but à ce moment-là était de progresser et de développer mon jeu car on me considérait depuis Pau Orthez comme le Jordan français à cause de mon jeu tout en percussion.

On sait que la carrière des sportifs professionnels est faite de hauts et de bas, tout au long de ta carrière malgré quelques blessures, tu es toujours allé de l’avant, ou puises-tu cette force mentale ? quel conseil pourrais-tu donner à un futur sportif pro ?
Pour répondre à cette question, je dirais que chacun à son parcours de vie, à 9 ans j’ai perdu ma mère, avec mon grand frère Florent, nous avons été élevé par ma grand mère et nous nous sommes serré les coudes. C’est en partie de cette tragédie que provient ma force mentale, j’apprécie chaque jour sur cette terre, et toutes les blessures ou frustrations que j’ai dû endurer m’ont toujours galvanisé et jamais détourné de mes objectifs. Je sais d’où je viens et ce que j’ai dû traverser. Je conseille toujours à un futur sportif pro de toujours garder en tête ses rêves de grandeur, certes c’est pas toujours facile… mais soit on se lève le matin et on va taffer, soit on rester à se lamenter dans son lit.

En NBA, tu as toujours eu la réputation d’être un shooteur mais surtout un solide défenseur face aux meilleurs, es-ce que ça a toujours été ton poste favori ?
Quand je joue au basket, je n’ai pas de rôle spécifique, je cherche avant tout à prendre du plaisir sur le terrain, à faire en sorte de m’amuser le plus possible. Etre confronté aux meilleurs joueurs de la ligue que sont Lebron James ou Kobe Bryant est un jeu pour moi, j’ai la chance par rapport au reste du monde de les voir en face et de toucher leur maillot. Ils font leur show, ce sont des scoreurs, mais si je peux les arrêter ou les ralentir c’est bien pour moi, mon objectif est atteint. Il ne faut pas oublier que ce sont les meilleurs joueurs du monde, et pouvoir ainsi les défier me fait progresser dans mon analyse du jeu et dans ma manière de défendre contre eux, car avant d’être des stars ce sont des bosseurs acharnés avec une mentalité à toute épreuve ou presque…

Cites-nous les deux meilleurs moments de ta carrière jusqu’a maintenant ?
Je dirais que j’ai pas vraiment de meilleurs moments, car avant tout pour moi le basket c’est un travail où je m’accomplis en tant d’athlète. Les meilleurs moments sont véritablement les instants précieux que je passe en compagnie de ma famille, avec mes enfants, ils sont pour moi comme un refuge.

En tant que sportif pro, considères-tu la sneaker juste comme un produit technique ou apprécies-tu son coté lifestyle ?
J’apprécie vraiment le coté lifestyle d’une paire de sneaker pour la simple raison qu’il y a encore 10 ans ça n’existait pas vraiment, toutes les grandes marques qui dominent le marché, Nike, Adidas, ont travaillé et développé le lifestyle. Les sneakers aujourd’hui ont plus de valeur qu’il y a 10 ans. Avoir la dernière paire de Jordan en édition limitée est synonyme de fierté de nos jours.

Tu as été le premier et le seul Français voire Européen à avoir été sous contrat avec Jordan Brand, ça à du être un moment marquant pour toi, qu’as tu ressenti après avoir été choisi ?
J’ai été sous contrat avec Jordan Brand de 2003 à 2007, ça a représenté beaucoup pour moi, car quand j’étais jeune en Guadeloupe par manque de moyens, il m’arrivait quelque fois de jouer pieds nus au basket… et tout d’un coup me voilà choisi par la marque Jordan Brand comme ambassadeur, c’était juste incroyable ! Cette expérience chez Jordan Brand a été un summum dans ma carrière de joueur, j’ai énormement apprécié de travailler avec eux. Jordan Brand, c’est le meilleur service client et accueil dont un athlète peut rêver. Et puis avoir les chaussures avant les autres, c’était un prestige…

Pourrais-tu nous expliquer les coulisses de ce partenariat ?
En 2002/2003, en France on me considérait comme le « Jordan français » car mon jeu et mes moves selon certains observateurs ressemblaient parfois au jeu de His Airness. Mais personnellement je ne m’en rendais pas tout à fait compte. C’est la venue de Jerry West à Pau en 2003 qui m’a boosté, en autre pour avoir ce contrat. Et quand c’est arrivé, j’étais l’homme le plus heureux du monde. D’autant plus que j’avais tous les produits estampillés Jordan 6 mois à l’avance, je les portais juste pour montrer que je les avais avant tout le monde. Parmi la multitude de modèles mis à disposition par la marque, c’est la jordan III que je préférais par dessus tout. Un modèle simple et efficace.

Beaucoup de joueurs auraient aimé être sponsorisé par la marque Jordan, as-tu ressenti une fierté particulier en intégrant la Jordan Brand Family ?
Absolument et aujourd’hui encore, je ressens cette fierté d’avoir été sous contrat avec Jordan Brand, je continue à collectionner les Jordan, j’en possède énormément. Et surtout avoir côtoyé le meilleur joueur de tous les temps m’a rendu extrêmement humble et fier.

La marque avait pour habitude de ne signer que des joueurs américains, tu as fait l’exemption. Pourquoi la marque a t-elle dérogé à sa règle et a décidé de miser sur toi ?
Parce que, je pense encore une fois que j’avais un jeu basé sur le un contre un, sur l’énergie et l’agressivité en attaque comme en défense, qui sont des caractéristiques typiques du basket américain. Tous ces détails ont joué en ma faveur. Par la suite, j’ai su que Michael Jordan supervisait les vidéos des joueurs qu’il voulait signer pour sa marque. Sans me vanter, c’est une grande fierté de savoir que j’ai été sélectionné par sa Majesté elle-même…

J’imagine que tu as été fan de MJ étant jeune, est-ce que jouer avec ta première PE (players exclusives) a été un moment particulier pour toi ou était-ce qu’un simple équipementier ?
En effet, fouler pour la première fois les parquets de la ligue avec ma première PE avec en plus mon numéro de maillot affiché sur ma paire a été un moment unique et privilégié. Mais le must pour moi fût de jouer contre les Chicago Bulls avec mes Jordan aux pieds. C’était vraiment un rêve qui devenait réalité. A aucun moment je n’ai considéré Jordan Brand comme un simple équipementier, mais bien comme un signe de réussite.

Est-ce que tu comprends le fort engouement pour la marque Jordan Brand de la part des passionnés et des collectionneurs de nos jours ?
Il y a encore 10 ans de cela il n’y avait pas encore d’engouement aussi prononcé pour les Jordan, mais de nos jours, les gens arrivent à se battrent pour en avoir une… On est purement dans une logique marketing ou l’offre ne correspond pas à la demande, le produit est raréfié ce qui amplifie sa valeur marchande.

Tu as été aussi le premier Français a avoir été signé par la marque Chinoise Peak. J’ai eu ouïe dire que Peak t’accordait une grande confiance et que tu avais eu la possibilité de créer tes propres modèles. Tu as même pu réaliser une PE étiquetée « Guadeloupe », raconte nous la genèse de cette collaboration ?
Ma première paire de Peak résume en réalité ma carrière, lors de la signature de mon contrat, j’ai obtenu la possibilité de créer mon propre modèle et de participer à son design car je voulais une chaussure qui me corresponde, et qui retrace mon parcours, c’est un projet que j’ai pris très à cœur. En effet la paire était paré d’un colorway bleu et blanc faisant référence aux couleurs du club des Orlando Magics. Elle symbolisait aussi le Golden Gate Bridge de San Francisco : le toe box était composé d’une fine toile élastique sur laquelle était placé le logo Peak. Les rayures marrons sur cette toile représentaient le Golden Gate Bridge, et à l’arrière de la chaussure, on distingue des barreaux blanc qui symbolisent là encore l’armature métallique du Golden Gate Bridge. A l’intérieur de la languette, le chiffre 64 représente le département des Pyrénées Atlantiques où se trouve la ville de Pau où j’ai également joué. Il fallait aussi que la paire fasse référence à la Guadeloupe. Du coup la semelle intérieure représente la carte de mon île. C’était important pour moi. Je suis fier également que beaucoup de joueurs NBA portent cette paire, même s’ils n’en connaissent pas l’histoire et toute sa symbolique. Au final, cette paire me ressemble vraiment.

Le mot de la fin…
J’aimerai dire à la jeune génération qui portent des Jordan et apprécient vraiment les sneakers, qu’ils doivent être fiers de porter leurs paires. A travers elles, ils représentent le meilleur joueur de tous les temps. Cela fait partie de la culture sneakers, et à ce titre j’apprécie beaucoup le travail de Sneakers Culture qui véhicule cette culture. Les paires ont une histoire. Et les sneakers que l’on porte aujourd’hui en auront une dans 10 ou 20 ans, et cela ajoutera à leur valeur.

Crédit photos: Babylon

S.A

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AF1 Pigeon by Medhi Cament

Bonjour Medhi, on a récemment aperçu ton custom assez particulier d’une AF1 Pigeon ? Peux-tu nous en dire plus ?
Ce fameux custom … Mon premier à vrai dire ! Je pense qu’il est réussi, même si quelques détails ne sont pas parfaits mais j’en suis fier en toute modestie. Pourquoi une Staple Pigeon ? Tout d’abord c’est coloris qu’a créé Jeff staple (le créateur) est juste l’un des meilleurs combo de couleur pour une Sneakers. Ça respire la légèreté et la simplicité. J’ai la Puma x Staple Pigeon, et à chaque fois je la porte, j’ai peur de l’user et de la salir. Je me suis donc dit “pourquoi ne pas t’en faire une que tu pourras porter tout le temps? ” J’ai donc été regarder sur Google image les différents customs qui ont été réalisé sur ce coloris, quasiment aucuns… Et j’ai remarqué qu’il y avait aucun custom avec une AF1. Ca a été le déclic…

Éclaire-nous sur les différentes étapes qui jalonnent la création de ce modèle si particulier ?
Je pense que la toute première étape pour la plus part des personnes comme moi a été de choisir un coloris célèbre d’une marque souvent tiré d’une collaboration, et de la reproduire sur une autre paire. Les amateurs nous diront “mais tu es bête, pourquoi tu n’achète pas une deuxième paire original ?” Il faut savoir que ce genre de paire original à la revente dépasse souvent les 600 Euros…
La deuxième étape est de choisir un modèle basique qui ce rapproche le plus du coloris qu’on voudrait reproduire. A savoir que j’ai choisi la Air Force One Blazer pack grise .
La troisième étape est le choix des couleurs ! L’une des plus complexes pour rester fidèle au maximum à la paire originale. Grâce à l’aide de Rudnes Custom, un pionnier dans le monde du custom, j’ai su choisir parfaitement les couleurs. J’ai aussi du faire quelques mélanges, mais ça.. comme les magiciens je garde le secret.
La quatrième et dernière étape pour faire court, c’est l’application de la peinture sur la paire. Il faut être très pointilleux et avoir une énorme patience ! Une vertu que j’ai découvert…

Selon toi, pourquoi le custom est-il si répandu, au point que certaines marques récupèrent cette tendance issue de la rue ?
Dans le custom il y a les pointures ! Si on reste dans le langage Sneakers en France. Il y a Rudnes Custom qui est spécialiste dans la peinture et le design, et il y a Rudboy, un acharné de la machine à coudre qui peut vous faire une paire de folie avec des imprimés.
Le custom touche de plus en plus d’amateurs comme moi qui essaient de découvrir de nouvelles facettes dans ce sneaker game, de nouvelles compétences, de nouveaux challenges.. Oui oui un challenge !! Généralement quand on fait un custom on se dit au fond de soit “il a réussi à faire ça ? Pourquoi pas moi … !”
Certaines marques sont à l’affût de custom pour chercher un second souffle à un modèle ou pour en créer d’autre en voyant l’intérêt suscité sur la toile…

L’avènement des programmes ID chez les marques depuis plusieurs années est-il une simple réponse à la personnalisation produit ? Ou est-ce un moyen d’attirer les fans de custom vers ces dites marques ?
Les programmes ID sont de plus en plus répandus et rencontrent une nouvelle clientèle de plus en plus nombreuse. Le plus célèbre est celui de Nike évidement, leur concept est vraiment intéressant car il vogue sur la tendance des matières telles le cork, l’éléphant print, et le camo. Ils prennent l’argent là où il y en a à prendre !! C’est normal. En créant des ID on fait en quelque sorte un custom… L’idée d’avoir une paire unique explose littéralement dans le milieu. L’avantage des ID c’est que la qualité est présente. Le moins c’est que les matériaux et le panel de couleur sont prédéfinis.

Ta paire a tourné sur pas mal de réseaux sociaux, comment a t’elle été accueillie ? T’attendais-tu à de telles retombées ?
C’est vrai que part mon grand étonnement la paire a fait le tour des réseaux sociaux en Europe et en passant directement sur l’instagram de Jeff Staple, désigner et créateur de la marque qui m’a félicité pour le travail fourni sur la paire. J’ai été surpris des retombées et échos que j’ai eu pour un premier custom, les critiques ont été très très positifs au point que certaines personnes veulent passer commande … La paire a été super bien accueillie ce qui me motive encore plus à en faire une autre.

Le mot de la fin ??
Je suis vraiment content d’avoir eu la parole sur Sneakers culture, merci à Limol max Je voudrais vraiment remercier Raphy Ghezouani de son blaze Facebook, pour ses photos. P.s : Vive la Sneakers !

Crédit photos: Raphy Ghezouani

S.A

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Dan de Ticaret, un pionnier au coeur de Paris

Sneakers Culture est allé à la rencontre de Dan de Ticaret qui ouvert la première boutique hip hop de tout le continent Européen à l’ époque. il revient avec sur cette épopée qui l’amené à croiser de jeunes artistes qui sont devenus les stars d’aujourd’hui. Il nous livre également avec une grande sagesse sa vision de la culture hip hop d’antan.

Bonjour Dan, présente-toi en quelques mots ?
Bonjour, je suis Dan, effectivement de la boutique Ticaret. C’est la rue qui m’a anobli, qui m’a donné cette particule « De » Ticaret. Je suis originaire des Antilles et plus présisement de la Martinique, j’ai aujourd’hui 53 ans. J’ai ouvert la première boutique hip hop de toute l’Europe en 1986. Je suis DJ résident au Reservoir le vendredi soir. J’ai contribué à ma manière à l’emergence de la culture hip hop en France.

Comment t’es-tu imprégné de cette culture ? Comment es-tu venu au hip hop ?
J’ai toujours aimé et baigné dans la culture américaine, et c’est par cet intermédiaire que j’ai découvert la culture hip hop. Mais j’ai eu un vrai déclic à l’occasion de la tournée des New York City Rap, en 1982. Il s’agissait de la première venue en France de Afrika Bambaataa, le Rock Steady Crew, les New York City Breakers, Mister Frezze, le DJ DST notamment. Toutes les disciplines de la culture hip hop étaient représentées : le graff, le rap, la danse… Ce concert fut un électrochoc pour moi, un révélateur. J’avoue avoir été attiré par l’affiche (sponsorisée à l’époque par Europe 1) qui titrait « les meilleurs danseurs de New York ». Moi, comme beaucoup de jeunes à ce moment-là, je dansais la funk qu’on appelait alors le jazz rock. J’étais curieux de voir les meilleurs danseurs de NYC et quand je les ai vus par terre, à faire ce que je considérais comme étant de la gymnastique, franchement j’ai trouvé ça enfantin et un peu bidon. Même la musique avec les boîtes à rythme me paraissait trop simpliste. Au cours de cette même soirée, il y avait également le graffeur Futura 2000 qui faisait une peinture, il posait les couleurs sur sa toile, mais pour moi cela n’avait rien d’accrocheur… Malgré ma déception je suis resté car je sentais que quelque chose allait vite me faire changer d’avis sur l’ambiance de cette soirée. Le danseur Mister Frezze est arrivé, et a fait sa petite marche arrière avec ses gants blancs, qu’on a appelé ensuite le moonwalk, et là tout s’est coordonné : ses pas collaient parfaitement à la musique, qui du coup m’a paru plutôt bonne ; et au même moment Futura 2000 finissait son graff, soulignant les contours en noir… Le lettrage m’est alors apparu, comme une révélation, et j’ai attrapé le virus direct ! J’avais 22 ans et ça ne m’a plus quitté. A cette époque, je faisais aussi du roller et j’ai alors tout laissé tomber pour me consacrer au break dans un premier temps. J’ai progressé rapidement au point, dès 1984,  de faire partie de ceux qui avaient le droit de danser dans le cercle aux soirées break du Bataclan animées par DJ Chabin. 

Comment vivais-tu cette passion grandissante pour le hip hop ? 
Ma passion pour le hip hop est vite devenue dévorante et d’une certaine manière presque négative, c’est à dire qu’avant de connaître le hip hop, comme tout les enfants des années 60/70, je m’adonnais à la funk, au reggae, au jazz rock, à la pop…, mais quand le hip hop est entré dans ma vie, je me suis mis des œillères et ne jurais plus que par ça. Je ne supportais que ça, à tel point que pour être joyeux il me fallait écouter du hip hop. Je n’écoutais plus rien d’autre, ça a été une vraie dérive. Mais après être devenu DJ et musicien, j’ai enfin pu retrouver goût à d’autres influences musicales. Dans les années 80/90, j’ai connu aussi ma période black power, un peu poussé par des films comme Do The Right Thing de Spike Lee. Je me suis rendu compte par la suite de la négativité de mon discours parfois, j’étais très revendicatif, « on était les ennemis de la terre, seuls contre tous ». L’excès est le revers de la médaille de la passion. Il faut parfois savoir prendre un peu de recul, et surtout ne pas oublier d’écouter les autres.

Le premier concert de Public Enemy à Paris en 1989, ça te parle ?
Bien sur que je m’en souviens, Public Enemy c’est un groupe de rap estampillé black power, qui réanime la mentalité Black Panther et qui en fait l’historique. Tout cela arrive à un moment où la planête est assez « afro-centrée », les plus grandes stars noires du moment tournent en Afrique ou proposent des thématiques africaines dans leur travail, comme Eddy Murphy dans Un prince à New York ou Michael Jackson à travers ses clips… Les jeunes à Paris arborent fièrement leur collier Afrique. L’ arrivée en France de Public Enemy est teintée d’une polémique car un des membres du groupe dénonce ce qu’il pense être la suprématie juive, ce qui leur vaut d’être connoté comme un groupe raciste venu jouer au Zenith. Pourtant on se sentait représentés par leur musique qui nous faisait vibrer, le coté politique on le suivait mais on était pas des militants acharnés, on était juste heureux de voir des noirs qui parlaient de nous.

Regrettes-tu l’époque des Mix Tapes des années 90 ?
On peut toujours regretter plein de choses, mais ce que je regrette le plus c’est le contact humain qui était pratiquement « obligatoire » à l’époque. Il n’y avait pas de facebook ou de portable. Aujourd’hui les Mix Tapes continuent d’exister, elles sont sur le net, peu de gens les achètent, et elles sortent sans aucune logique. Il n’existe pratiquement plus d’échanges entre artistes, tout le monde fait son Mix dans son coin, et donc de ce fait il n’y a pas réellement de saine compétition puisqu’elle est n’est devenue que financière. La popularité du hip hop a fini par desservir sa fonction première qui était le partage. Cela a rendu les artistes égoïstes, à mon sens c’est devenu un business au sens stricte du terme.

A quel moment et pourquoi as-tu décidé d’ouvrir un shop hip hop ?
J’étais commerçant dans la fripe, les vêtements anciens des années 50/60, que je ramenais des Etats-Unis et que je revendais beaucoup au cinéma. Je livrais les studios et les costumières, mais entre deux rendez vous, il ne passait souvent pas grand chose. C’est là que l’idée m’est venue d’ouvrir cette boutique de fripe pour que mes clients sachent ou me trouver, ça rentabilisait mon stock aussi. J’ai trouvé un local à Stalingrad, rue Chateau Landon, en face d’un terrain vague sur lequel nous nous retrouvions déjà à l’époque, où Dee Nasty venait faire des Free Jam . Il mettait le son, on breakait, les autres graffaient. Les graffeurs du BBC (Bad Boys Crew) avaient pris leurs quartiers sur ce terrain et quand il pleuvait ils venaient souvent s’abriter à la boutique. Ils m’ont demandé de leur rapporter des ceintures des States. Au début je ne voulais pas mélanger ma passion pour le hip hop avec mon business de fringues, puis j’ai fini par leur dire OK.  Ils en voulaient une bonne centaine. J’ai trouvé les ceintures mais comme elles étaient trop chères, je leur ai demandé d’avancer la moitié du prix, et si je ne leur apportais pas d’ici 1 mois et demi, je les remboursais…  Ils ont tous accepté ! J’ai finalement pu en rapporter plus que prévu, et je n’étais pas au bout de mes surprises car en moins d’une semaine après mon retour de NY, un Belge est arrivé à la boutique pour m’acheter une ceinture,  je suis resté littéralement scotché du fait qu’il était venu de Bruxelles spécialement pour venir récupérer une ceinture, en me disant que Paris c’était moins loin que NYC ! De là j’ai compris que j’avais mis le doigt dans un business lucratif, et je me suis mis à répondre aux demandes du moment, les fat laces, les gold chains, les Kangols et les tee shirt Run Dmc, Beastly Boys… Je me suis aussi fourni à Londres car les maisons de disques y vendaient les vinyls avec des T-shirt inclus dans les pochettes. Et puis un jour on a commencé à me demander de la basket, j’étais à l’écoute de ma clientèle et je ramenais ce qui se vendait. en à peine 6 mois de temps ma boutique de fripes est devenue une boutique 100% hip hop. Je me disais même à un moment que Ticaret était la boutique des lascars de l’époque. Je faisais également une sélection sur place à NYC si bien qu’il arrivait que ceux qui achetaient chez Ticaret voyaient leur fringues ou leurs baskets dans les clips de rap US du moment, ça voulait tout simplement dire qu’a Paris on était frais et à l’heure !

Quand le rappeur LL Cool G a signé avec la marque Troops, je suis allé les démarcher pour vendre la marque dans ma boutique. J’avais 100.000 francs à mettre sur la table, mais ils n’ont pas cru en moi, il m’ont envoyé balader car ma mise était insuffisante. Mais j’ai continué à ramener d’autres marques de basket à ma boutique, et un an après j’ai relancé Troops avec mon associée. Les marques changeant facilement de stratégies commerciales, nous avons finalement conclu un accord sur une valeur totale de 500.000 francs ! Même mon banquier me prenait pour un fou pour avoir misé sur une marque… J’étais sûr de mon coup, et grâce à ce deal, j’ai été pendant un temps été le monsieur basket à Paris, car c’était simple, la basket était à NYC, chez Ticaret en France et un peu à Londres. En une année, j’ai vendu 1800 paires de pompes rouges, marrons, bleues, vertes… Mais mon investissement sur une seule marque estampillée hip hop a un peu bloqué mon développement. Quand j’ai commencé à faire de la basket les modèles étaient à dominante marron comme les Adidas Tobacco, blanches ou noires comme les Reebok Pump. J’ai vendu les Troops qui étaient bleues, rouges, orange ou vertes, et au même moment les baskets comme Ewing et les Fila qui connaissaient un véritable succès. Les modèles se multipliaient et je n’ai pas pu suivre la demande puisqu’une grosse partie de mon budget était sur la marque Troops. Je faisais 60% de mon chiffre d’affaire avec la basket. A ce moment les Halles ont aussi commencé à se développer, et comme j’allais fréquemment aux Etats Unis, je me rendais compte de l’ampleur que prenait Foot Locker, conscient que tôt ou tard, il allait mettre le pied à Paris et rafler des parts de marché à Sport 2000. Je ne m’étais pas trompé puisqu’ils ont d’ailleurs ouvert leur première boutique à Denfert Rochereau dans le 14ème peu de temps après en 1991. Quand la boutique Foot Locker les halles a ouvert à coté de mon shop,  j’ai alors compris que la durée de vie de ma boutique était comptée et j’ai décidé de programmer la fermeture de Ticaret sur quatre ans. Ticaret ouvert en 1986, aura tout simplement été présent pendant 14 ans, et été encore une fois, la première boutique hip hop en Europe. Tout simplement.

Peut-on légitimement dire que tu as été le premier influenceur de Paris ?
Effectivement j ai été tendance et street, mais je m’en suis pas réellement rendu compte à l’époque de la boutique. Mais des années après la fermeture de Ticaret, quand je constate qu’aujourd’hui je suis encore interpelé dans la rue à Paris, ou partout en France c’est très gratifiant. Certes Ticaret n’aura duré que 14 ans, mais avant que toute l’Europe comprenne réellement le mouvement hip hop, j’ai été la seule boutique hip hop pendant 3 ans. Avant même que 4 Star General n’ouvre à Londres. Ce dont je suis fier avec l’aventure Ticaret, c’est que les lascars ont vu en moi un gars de la rue comme eux-même, avec qui ils breakaient, ça leur a donné confiance, leur a montré que l’on pouvait entreprendre et pour certains permis d’ouvrir leur business. Par exemple c’est à partir de Ticaret qu’un mec de Lyon à commencer à faire des colliers zulus et à en vendre ; c’est à Ticaret qu’une nana qui s’appelle Béa aujourd’hui fait des bagues pour des Vip du rap français tel DJ Abdel ,Dee Nasty, Sidney ; c’est encore avec Ticaret qu’on a commencé à faire des tee shirt Graff, et que Dj Cut Killer a commencé à vendre ses Mix Tapes ; et c’est chez Ticaret que le groupe Moda et Dan a débuté en montant un studio d’enregistrement dans le sous sol de la boutique. C’est d’ailleurs là que des rappeurs comme La Cliqua, Booba , Afrodiziak, Expresion Direct, ou Kery James, le 113, Johny Go, Intouchables, et beaucoup d’autres ont fait leurs premiers pas. Tous ont transité  à Ticaret, ce dont je suis très fier. J’ai été respecté malgré le fait qu’il y avait des bandes rivales. Je leur ressemblais, mais je savais qu’il fallait toujours rester humble et ne pas faire de favoritisme dans ma clientèle, qu’elle fut du 16ième ou de Pantin. Je n’avais aucun préjugé et m’occupais du gars de Pantin aussi bien, voir mieux que du fils à papa qui avait pourtant plus à dépenser. J’avais vraiment trop souffert de ces mêmes préjugés plus jeune, alors c’était ma ligne de conduite. Chacun était respecté. De plus quand tu venais à la boutique tu n’étais pas obligé d’acheter pour recevoir de la considération, c’est comme ça que je fonctionnais.

Qui était tes clients ? était-ce des passionnés de la première heure ? des sportifs, des artistes ? ou t’adressais-tu à un plus large public ?
De 1986 à 1989 avant que le hip hop ne se démocratique, ma clientèle était composée de passionnés de la culture hip hop. Mais ma clientèle dans son ensemble était à 50% étrangère (40% de Suisses, 40% d’Allemands et 10% d’Italiens), ce qui représentait 50% de mon chiffre d’affaire. Je me rappelle qu’à cette époque j’étais tout seul sur le marché européen avec 4 Star General à Londres, alors que toute la planête était déjà hip hop et que Run Dmc avait signé avec Adidas. Mais cette culture faisait tellement peur aux autres commercants, ils n’y croyaient pas. Mais à force de voir des gens porter des Kangols et des Baskets, ils ont fini par me prendre au sérieux. Je me rappelle que j’allais au salon du sport et que toutes les marques me recevaient comme un Vip. Elles cherchaient alors à décrypter les tendances. Leurs représentants voulaient absolument nous refourguer toutes leurs baskets mais nous ne sélectionnions que celles qui étaient hip hop. Mais en parlant d’artistes, je me rappelle avoir fait venir en séance dédicace Old Dirty Bastard en 1997. C’était un vrai phénomène, le mec qui n’avait peur de rien. Il avait débarqué complètement imbibé en réclamant de faire d’abord rentrer les filles …On en rigole encore…

Et en tant que boutique indépendante as-tu eu de la concurrence  ?
Au bout de quelques années, j’ai transféré ma boutique aux halles. Il y avait aussi celle de  George Eddy, Magic Basket, qui était proche de mon shop. Il y avait également, pour ceux qui s’en souviennent, Ekivok aux Halles à qui je vendais de la marchandise, car je considérais que je ne devais pas être l’unique vecteur de cette culture hip hop à Paris. En province aussi, les boutiques commençaient à pousser, et souvent la même boutique vendait de la marchandise pour les skateurs, pour les skins et le hip hop. Mais ce sont les Anglais qui ont commencé en premier à inonder le marché européen. Ils avaient déjà intégré bien avant nous que c’était un business bien lucratif… Et par la suite, le hip hop est devenu un business très sérieux. Les Allemands et les Hollandais ont pris la relève : quand les marques américaines voulaient s’installer en Europe elles allaient les voir en premier car ils était souvent beaucoup plus structurés que nous les Français. Les marques (comme SPX par exemple) faisaient des études de marché, et du coup préféraient souvent s’installer dans d’autres pays européens, du fait de la faiblesse de l’offre en France, alors que nous français étions quand même précurseurs : Nous avions par exemple l’émission de Sidney hip-hop qui passait sur TF1, elle fût la première émission hip hop au monde diffusée à la télévision. Quel paradoxe tout de même ! Aujourd’hui nous sommes le deuxième marché hip hop après les Etats Unis, ce qui prouve que les lignes ont bougé et que la culture hip hop s’est émancipée en France et affranchie de toutes sortes de préjugés y compris dans le business.

Ta boutique Ticaret connaissait un succès phénoménal à Paris grâce à ta sélection pointue de fringues et de basket. Y avait-il un revers à cette médaille ?
Il y avait de la place pour tous, malgré le fait que Ticaret était très protégé et que mes fans scrutaient la concurrence et venaient m’en informer. Il arrivait que certaines boutiques se fassent retourner, mais jamais Ticaret… Par contre au cause de tout ce succès, j’ai vite eu un retour de batôn avec la dépouille qui a duré un bon moment. Ça a débuté avec les doudounes Chevignon à Paris et s’est retrouvé aussi à Ticaret avec les baskets dans les années 90. Il fallait assumer les basket qu’on avait aux pieds, quitte à se battre pour les conserver, on parle d’un phénomène qui a plus de 15 ans ! Un jour, le journal France Soir est venu faire un reportage sur l’engouement pour les basket et quelle ne fut pas ma surprise de voir l’article du journal le lendemain « Ticaret, la Mecque des zulus », qui disait en substance que les gamins dépouillaient des gens dans le métro pour se faire des sous et pouvoir aller s’acheter des basket à Ticaret. Les paires déjà à l’époque coutaient cher. Pour exemple je vendais la Pro Performa de Troops 800 francs, soit presque que le prix d’une paire aujourd’hui, 15 ans plus tôt, et les mec se saignaient pour se la payer. Le prix n’était pas abusif non plus, car il fallait que j’ajoute les frais de douanes et ma commission au prix d‘achat US. De toutes manières, déjà à l’époque, le prix des paires étaient une folie allant de 500 FF à 1200 FF.

Quel rôle le hip hop avait-il en France à cette époque ? Pouvait-on parler de culture ou juste était-ce un gros business ? Quel regard portes-tu sur le mouvement ? Penses-tu comme beaucoup que le hip hop « c’était mieux avant » ?
Pour moi le hip hop fut et restera toujours un mouvement culturel fort, même s’il a beaucoup évolué. Ce mouvement a sorti les jeunes banlieusards de leurs quartiers respectifs. Ils se sont approprié les rues, les trottoirs, les villes jusqu’on aux Champs Elysées pour danser, ou au Forum des Halles à Paris. Ce lieu est devenu mythique. Ça a ouvert l’esprit de beaucoup à la ville, ça a permis la mixité et l’échange autour de cet art, et généré de belles rencontres ; ces échanges autour du graff ou de la danse ont permis au hip hop d’évoluer aussi vers la danse contemporaine par exemple. Le rap a lui aussi beaucoup évolué. La culture hip hop a décomplexé beaucoup de jeunes en leur offrant un but dans la vie, de la discipline et la possibilité d’atteindre leurs objectifs. Gamin, je ne pensais pas ressentir un jour toute cette énergie et la confiance que le hip hop m’a apporté . Si j’ai un message à transmettre aux jeunes d’aujourd’hui c’est celui là : « Sky is the limit » … et n’oubliez pas que beaucoup se sont sacrifiés pour que vous soyez là… Et même si tout n’a pas fonctionné, l’important est qu’il y ait a eu beaucoup de tentatives.Le hip hop avec toutes ses disciplines ont ouvert des horizons. Le rap, le tag, le graff, la danse, les DJs, etc… C’était un esprit collectif, un moteur. On voulait être performant dans notre domaine. La compétition était saine, et ne se terminait plus en bagarre comme avant. Si on pouvait gagner un peu d’argent avec, alors c’était un plus et mérité.

Aujourd’hui, le hip hop est le reflet de la société. Je m’explique… les rappeurs parlent business, guns etc… Mais ce n’est pas le hip hop qui créé ça. La fin de la guerre en Serbie dans les années 90, la chute du Mur de Berlin, la dissolution de l’Union Soviétique ont favorisé l’arrivée des armes dans les cités. Les jeunes des cités ont chassé les gros bonnets de l’époque et ont repris le flambeau des business illicites, non sans heurs… c’est ce qui gangrène aujourd’hui le hip hop. Les nouvelles générations arrivent dans un monde où soit tu réussis, soit tu es un naze ! Tu es considéré et respecté si tu as des sous, mais si au contraire tu es intelligent mais sans argent, on ne te considère pas. De 50 Cent à Booba, ils ont tous cette mentalité-là. J’espère que cette jeunesse va finir par se rendre compte qu’il y a des choses plus valorisantes que l’argent, que ce n’est pas une fin en soit et que l’on peut réussir autrement.

Mais à propos du rap je ne suis pas pour autant partisan du « c’était mieux avant ». On a contribué à son essor, et c’est devenu un business comme un autre. Mais je considère le rap un peu comme mon bébé, un fils que l’on a choyé et protégé… Maintenant il a grandit, est devenu majeur et il fait sa vie et ses choix, même si on ne les approuve pas tous. Point barre ! Il en est de même pour le hip hop. On a tout fait pour qu’il s’épanouisse au grand jour. Je déplore juste qu’en France on perde un peu la mentalité « Old school ». En Suisse ou en Allemagne, quand je vais à des parties je retrouve cette ambiance d’antan… Les gars sont encore habillés à l’ancienne, et ça me plait. Pour moi la richesse tient en une phrase : « le matin, tu te réveilles et tu n’es pas dégoûté de cette vie… », c’est ça la richesse… Tu as beau avoir des millions sur ton compte, mais si le matin tu te réveilles angoissé, que tu prends des cachets pour tenir le coup, etc… Ta tune ne te sert à rien. Je pense vraiment que l’argent ne fait pas le bonheur.

Mais revenons sur Ticaret… Après avoir vécu de ce business là, quel enseignement tires-tu de ces 14 années d’activité ?
Pour moi ce fut que des années de bonheur bien sûr, j’ai beaucoup de chance d’avoir été un autodidacte. Je n’ai pas fait d’étude de commerce, à la base, j’étais électricien. Mon grand regret c’est peut-être de ne pas avoir été plus intelligent à l’époque par rapport à certains choix en terme de business. Je serais peut-être devenu plus grand. Mais si c’est pas arrivé, c’est sans doute que je n’ai pas tout fait pour. Ce qui m’a plu à Ticaret ce sont les rencontres, cotoyer des gars comme Joey Starr, Cut Killer, Booba et bien d’autres… On était entre nous, et quand ils ont tous commencé à faire carrière on se voyait moins, ce n’était plus la même ambiance, et j’ai ressenti le besoin de tourner la page. Je donne souvent comme excuse de l’ouverture de Foot Locker, qui finalement n’en n’étais pas vraiment une…

Tout à l’heure tu disais que pour être riche il suffisait d’être heureux, j’imagine que parmi tout ce que tu as entrepris, tu as fais des choses qui t’ont vraiment en mis valeur, la rue t’a apporté sa reconnaissance, est-ce que tu peux me parler de cet aspect des choses ?
A propos de la reconnaissance, je me rappelle par exemple d’un moment partagé avec DJ Chabin, qui a fêté son anniversaire au New Morning en 2013 avec comme invitée l’une des dernières choristes de James Brown. J’y ai revu Sidney de ( HIP HOP ), Grand Jack (fondateur des Black Panther à Paris)… Ils m’ont littéralement enlacé, en me disant « Dan, tu te rends pas compte de ce que tu as fait pour nous, comment tu nous a représentés, comment tu nous a fait kiffer ! ». Encore une fois je m’appelle Dan de Ticaret, le milieu m’a anobli. Pour moi la reconnaissance elle est là…Je me souviens également en 1997 quand Joey Starr m’a fait la surprise de venir à mon anniversaire. J’étais très touché. Tout le monde me remercie notamment pour les avoir encouragés à prendre des initiatives. Franchement sans être prêtre, j’ai réussi ma mission, je me suis rendu heureux, j’ ai rendu mes enfants heureux et fiers, et puis surtout ça en a motivé beaucoup d’autres à entreprendre. La vie peut être très courte, ou très longue ! Il faut croire en soi, redoubler d’énergie et être positif pour ne rien avoir à regretter.

Crédit photos: Babylon / Dan

S.A

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